Alpissima - Laurence de la Ferrière

Retour au pays !

Bourg St Pierre - Hospice du Grand St Bernard – Courmayeur - Les Arcs – Tignes

Un grand moment de sérénité, de générosité et de partage que notre passage à l’hospice du Grand St Bernard. Après une courte montée, nous nous reposons dans cette grande bâtisse de pierres balayée par les avalanches, au rythme des complies et des messes. Le lendemain, nous partons par un temps incertain en direction de Courmayeur. Nous savons que le mauvais va arriver et il nous faut franchir deux cols le plus rapidement possible.

Le white out nous cueille à la sortie du premier et c’est avec une certaine appréhension que nous traversons de longues pentes raides et gelées au-dessus d’un profond vallon où il ne ferait pas bon perdre l’équilibre. Soudain, les nuages disparaissent comme par enchantement, le ciel laisse apparaître de belles trouées bleues et la température augmente brutalement d’une dizaine de degrés. La pente se redresse sous le deuxième col et la neige transformée en « soupe » par la chaleur provoque quelques glissades rattrapées de justesse.

On se rapproche du but...

Enfin, nous parvenons au dessus de la vallée du Val Ferret, encore une belle descente jusqu’à travers la forêt et nous terminons en « skating » le long des pistes de ski de fond qui nous mènent à La Palud. Une étape de plus, un jour de gagné. Nous sommes dorénavant en France et je ne cache pas mon plaisir d’approcher lentement mais sûrement mon but.

Nous repartons le lendemain pour atteindre Les Arcs mais la neige et le vent nous obligent à rebrousser chemin, nous décidons de prendre une journée de repos. Le temps s’améliore et nous traversons jusqu’aux Arcs au prix de plus de 30km et d’un dénivelé non négligeable. Mais quand on aime on ne compte pas !!

Une autre journée, une étape supplémentaire et nous sommes aujourd’hui à Tignes. Ce n’est pas le lieu le plus romantique que je connaisse même si je reconnais que l’immensité du domaine est un atout incontestable.

Voila en quelques lignes un petit résumé de notre quotidien.
A très bientôt.
Laurence 

Connaître, aimer et protéger la montagne

Saas Fee – Zermatt – Berthol – Chanrion – Bourg St Pierre, quatre jours de pur bonheur, la fameuse Haute route mais à l’envers, toujours personne et aucune trace, la montagne nous accueil d’une manière privilégiée et nous sommes sous le charme.

Devant la vision de ces immenses glaciers recouverts délicatement d’un manteau neigeux immaculé, il est difficile d’envisager la disparition de tels paysages. En discutant avec les gens « du pays », les gardiens des refuges et les guides, amoureux de leur métier et de leurs montagnes, soucieux de communiquer de vrais valeurs et de protéger leur environnement, j’ai eu la confirmation que je militais pour de bonnes raisons :

• Oui il faut pénétrer cette nature sauvage et plus ou moins inaccessible, pour la comprendre et prendre conscience à quel point elle est source de notre énergie et de notre équilibre.
• Oui il faut prendre la peine de montrer les belles choses que nous avons à notre disposition pour générer une motivation à long terme.

Profiter de l'instant en attendant Montgenèvre

Les conditions météo favorables pour quelques jours nous ont permis d’avancer vite au prix d’une moyenne de 1500 à 2000 mètres de dénivelés positifs par jour et un nombre considérable de kilomètres. Mais maintenant, ce morceau de vie au cœur des Alpes, entièrement consacré à cette traversée, se suffit à lui-même. Chaque jour est une nouvelle étape, une découverte, une nouvelle rencontre et le temps n’a plus que la valeur de celle qui nous permet d’avancer toujours et encore.

Nous repartons ce matin vers l’hospice du Grand St Bernard et tenterons de passer par le versant italien du Massif du Mont Blanc. Je me rapproche peu à peu du bord de la mer et surtout de ma rencontre organisée à Montgenèvre avec les jeunes de l’Eco-parlement. J’attends ce moment avec beaucoup d’impatience, j’aurai tant de choses à partager avec vous.

En attendant, toute mon amitié.
Laurence.

La montagne est la plus forte…

La montagne est la plus forte… Devant la violence inhabituelle des intempéries que nous avons subies ces derniers jours, nous nous sommes inclinés. Un break d’une petite semaine devait permettre à la neige de se stabiliser et au soleil de revenir. Et bien voila, c’est fait et la journée que nous avons vécue hier du col du Simplon à Saas Balen à finit par nous convaincre que notre décision était la bonne.

Lever à 6h du matin, le ciel d’un bleu clair est à l’image de la belle journée qui nous attend. Cela faisait si longtemps !! Nous partons anxieux des conditions qui nous attendent, il nous faut traverser des pentes raides, franchir deux cols dont le dernier à 3000 mètres et l’accumulation de neige augmente considérablement les risques d’avalanches. La pente dure, soufflée par le vent nous rassure et nous atteignons facilement le premier col. Par contre, la traversée est « minée » de plaques à vent et nous oblige à descendre au fond du vallon pour contourner l’obstacle.

Ensuite, après 5 heures de progression, nous apercevons la dernière pente qui nous permettra de franchir le deuxième col. Une énorme avalanche est descendue et couvre la totalité de notre itinéraire. Nous nous félicitons de notre choix de l’attente. C’est à pieds que nous remontons en traçant dans la neige ferme. Puis, en louvoyant habilement, nous parvenons à franchir les derniers mètres.

Une mauvaise chute... mais quel bonheur d'être en montagne !

Une fois de plus, la vision d’une nouvelle vallée m’émerveille. Les sommets sont adoucis par le récent manteau neigeux, la lumière diffuse est une invitation à la descente. Ce que nous ne tardons pas à faire dans une neige un peu lourde. Une mauvaise chute sur un caillou m’étire un peu les ligaments du genou. Il faut dire que le poids du sac et les 1800 m de dénivelé ne favorisent pas une grande souplesse, je suis dans une drôle de posture, la tête en bas et je ne parviens pas à dégager mes skis de la croûte. Dominique vient à mon aide. Je termine la descente plus prudemment, un troupeau de chamois s’élance devant moi.

Une belle journée pour redémarrer notre traversée, que je suis heureuse d’être en montagne. Continuez à nous suivre et à très bientôt.

Laurence

Avancer coûte que coûte !

Aujourd’hui, cinquantième étape et bientôt deux mois sur les skis à travers cols, sommets et vallons. Chamonix me semble un lointain souvenir et pourtant, si tout va bien, dans trois semaines je devrais atteindre le massif du Mont Blanc avant de terminer ma traversée au bord de la mer au milieu du mois d’Avril. C’est un bien long voyage pour lequel j’ai une chance extraordinaire : avoir suffisamment de neige (parfois un peu trop).

Hier, je suis montée à la cabane Cristallina à 2575 m d’altitude sous la neige et dans le vent. Au col, les nuages se sont déchirés pour laisser apparaître un immense cube de bois rectangulaire perché sur le rocher. Premier jour d’ouverture, le gardien est heureux de nous recevoir. Seul point désagréable, les toilettes ne fonctionnent pas, il nous équipe d’un rouleau de papier en nous proposant d’utiliser la nature. Le problème est que la neige épaisse et la situation du refuge ne nous offrent que peu de possibilité de s’isoler, j’attendrai la nuit…

Quelques randonneurs nous rejoignent et nous discutons des conditions et de notre projet qui fait bien des envieux. Minestrone et risotto ce soir au menu nous mettent en condition pour le lendemain.

Des inquiétudes pour la suite

Le matin suivant, le ciel est clair. Une longue journée nous attend pour rejoindre Valdo et j’espère que le temps va tenir. La tempête est annoncée pour dans trois jours, en attendant il faut avancer le plus possible. Nous avons le temps de descendre dans une première vallée puis remonter un long vallon pour franchir de justesse le col qui nous permet d’atteindre la vallée suivante dans le Piémont. Maintenant nous n’avons aucune visibilité mais nous sommes du bon côté et même les yeux fermés, nous arrivons à bon port.

Une étape de plus de gagnée mais il neige beaucoup et je suis un peu inquiète pour la suite. Dimanche, je devrais rejoindre le col de Simplon et aborder une partie plus connue et parcourue que ce que nous avons fait jusqu’à présent ce qui facilitera notre progression.

En attendant à très bientôt.

Laurence

Toujours des conditions difficiles

Cela fait trois jours que nous sommes repartis, naviguant tant bien que mal entre les périodes de mauvais temps et les problèmes liés à l’accumulation de la neige dans les pentes que nous devons traverser. Il est bien loin le « grand beau » qui illuminait nos journées du mois de mars ! Ne jouons pas aux enfants gâtés, quelques intempéries sont parfaitement normales. Du coup, pour des raisons de sécurité, nous favorisons les parcours en fond de vallée et les passages par des cols en basse altitude.

Hier, par un ciel voilé, nous avons remonté pendant quelques heures un chemin forestier que j’aurais pu trouver agréable s’il n’avait été aussi long. Soudain, à quelques dizaines de mètres, nous apercevons un énorme renard, gros comme un chien, qui disparaît furtivement dans les arbres. Puis, nous découvrons les restes de son festin, la patte déchiquetée d’un petit chevreuil. La couche épaisse de neige s’affaisse bruyamment sous mes skis, je sursaute, aux aguets. Je sais que l’onde peut se propager jusqu’à la pente que nous longeons et déclencher une coulée. J’allonge le pas pour me dégager. Fausse alerte.

Rester concentré pour franchir les obstacles

Encore quelques heures et de nombreux kilomètres dans un vallon de moraines enchevêtrées pour atteindre le col qu’il nous faut franchir afin de redescendre en direction de Splugen. La visibilité quasiment nulle nous fait aborder la partie la plus dangereuse avec beaucoup d’appréhension. Nous devons traverser à flanc de montagne un vaste cirque de pentes raides et chargées de neige entre une série de barres rocheuses particulièrement inhospitalières. Pas à pas et un à un, nous franchissons prudemment chacun des obstacles, concentrés pour éviter l’erreur et surtout réagir très vite face au départ éventuel d’une avalanche.

C’est gagné, l’itinéraire choisi par Benjamin était parfait. Je respire mais maintenant encore une dizaine de km à plat pour atteindre la station et ce n’est pas le plus confortable pour mes genoux douloureux.

Voila pour vous un épisode supplémentaire de cette traversée et à très bientôt pour la suite.

Laurence